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12 janvier 2013 6 12 /01 /janvier /2013 17:48
SINGLE. David Bowie a eu 66 ans mardi dernier. Au lieu d’attendre qu’on lui fasse un cadeau, il a préféré en faire un au public : un nouveau single, « Where are we now ? », dix ans après son dernier album Reality et six ans après sa dernière apparition sur scène. Ce nouveau titre est une véritable surprise, précédé d’aucune annonce ni rumeur. Mieux, pour les fans : il sert de préambule à un album prévu pour mars, The next day.
David Bowie HeroesBowie The Next dayLa pochette de ce dernier revisite celle d’un fameux album de David Bowie, Heroes, enregistré en 1977 lors de ce qu’il est convenu d’appeler sa « période berlinoise ». Le single de cette semaine et son vidéo-clip multiplient d’ailleurs les allusions à la capitale allemande et aux lieux fréquentés par le chanteur à l’époque.
ENO. En 1976, en effet, David Bowie part s’installer à Berlin où il travaille avec Brian Eno. De cette collaboration naîtra trois albums, Low, Heroes et Lodger. A l’origine joueur de clavier dans le groupe anglais Roxy Music, Eno est un musicien expérimental, précurseur de genres musicaux tels l’électro ou l’ambient, et l’un des pionniers de la technique du « sampling », ou échantillonnage de sons.
La chanson la plus célèbre de cette période de David Bowie est "Heroes", conçue dans les studios Hansa de Berlin Ouest, au 38 Köthener Straße, juste à côté du Mur, avec Brian Eno et le producteur Tony Visconti.
LARSEN. Le son très particulier de ce titre a été obtenu par un travail d’« overdubbing » (enregistrement de pistes par-dessus la base rythmique) qui prendra une semaine entière. Les musiciens font notamment un usage complexe de l’effet larsen. Ce phénomène acoustique strident est le résultat d'interférences entre un instrument électrique, des micros et l’amplification. A l’origine un son parasite (en particulier sur scène), il a été intégré dans les pratiques de studio depuis les Beatles.
Pour "Heroes", le guitariste Robert Fripp provoque délibérément des larsens avec son instrument et son ampli réglés au maximum, mais en prenant soin de noter à quelle distance de l’ampli il peut générer l’effet à partir de telle ou telle note en particulier. « Par exemple, expliquait en 2004 le producteur Tony Visconti dans le magazine Sound On Sound, un La pouvait 'larsener' à environ 1,2 m du haut-parleur de l’ampli, tandis qu’on pouvait le faire avec un Sol à 1 m. Il [Robert Fripp] marquait l’endroit avec du scotch si bien que lorsqu’il voulait jouer un Fa dièse, il se plaçait sur la marque 'Fa dièse' et c’est là que le larsen sur cette note sortait le mieux. » La technique a une contrainte : il faut jouer à un volume assourdissant...
VCS3. Pendant que Robert Fripp joue, sa guitare est reliée aux synthétiseurs VCS3 de Brian Eno. Il s’agit d’un instrument conçu à la fin des années 60 contenu dans une mallette, sans clavier mais doté de divers potentiomètres permettant de générer et contrôler des effets (filtres, oscillations). Le son de la guitare est donc traité et altéré par Eno au gré de son inspiration, en même temps que Fripp exécute ses larsens. Les musiciens feront trois prises selon ce procédé.
NOISE GATE. Mais la trouvaille la plus étonnante concerne l’enregistrement de la voix de David Bowie. Tony Visconti utilise la technique, déjà connue, du « noise gate », consistant à gommer tout bruit parasite au moment de l’entrée d’un son dans un micro (rumeur de fond, vibrations des amplis et des instruments, respirations, etc.), en paramétrant un volume précis à partir duquel le micro s’ouvre. Pour « Heroes », le producteur applique le procédé à pas moins de trois micros, situés à trois distances différentes du chanteur ! Une première.
La chose est facilitée par la taille du studio, une ancienne salle de concert de 1913 de 650 mètres carrés sous 15 mètres de plafond. Un micro est placé à 23 cm de Bowie, le deuxième à 6 m et le troisième à 15 m, les deux derniers étant équipés d’un « noise gate ».
RÉVERBÉRATION. Chaque micro s’ouvre à partir d’un certain volume de la voix. Et quand l’un s’ouvre, les deux autres se ferment. Quand Bowie parle presque, au début de la chanson, c’est le micro un. Quand il pousse le chant, c’est le micro trois. La distance de ce troisième micro fait bénéficier à l’enregistrement de la réverbération naturelle de l’immense pièce, mais la voix sonne loin dans le mixage, comme enfouie. Ce qui est l’effet recherché, la chanson évoquant deux amoureux s’embrassant près du Mur du Berlin, dans l’ambiance pesante de la Guerre Froide.
 
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