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5 novembre 2020 4 05 /11 /novembre /2020 13:18
On a les combats qu'on mérite. Beaucoup de commerçants se battent pour tenter, d'une manière ou d'une autre, de sauver leur secteur, donc leur emploi et leur survie économique, peut-être leur survie tout court. Chacun le comprend : l'instinct de survie est à l'oeuvre et cela mérite à peine des commentaires. Certains secteurs d'activité ont bénéficié d'un soutien particulier : les librairies en font partie. Le premier confinement a montré que la classification opérée par Maynard Keynes, qui place l'artiste (dont le romancier) en tête des fonctions les plus essentielles de la société, était pertinente. Beaucoup ont supporté ce confinement grâce à la lecture, à la musique, aux films et autres "produits culturels". En outre, une certaine tradition française place haut la lecture et le marché du livre français se maintient à un niveau élevé.
La librairie n'apparaît à l'évidence pas comme un lieu majeur de clusters. Les libraires comme les bouquinistes ont fait de nombreux efforts, comme beaucoup d'autres commerçants, pour éviter toute contamination : limitation du nombre de clients présents à la fois à l'intérieur des librairies, gel, rappel des règles de distanciation. Bref, l'importance de la librairie comme lieu d'épanouissement personnel et le faible risque induit expliquent l'engouement qui fit se lever de nombreuses personnalités pour une "exception culturelle".
Mais il y eut bien sûr, face à cette levée de boucliers, des anti-réouverture des librairies. Des citoyens qui pensaient que la défense des librairies était forcément hypocrite, parce que la culture serait forcément hypocrite, parce que personne ne lirait plus de livres. Des citoyens qui, au fond, croyant à l'existence du monde tel qu'il nous est présenté par les médias dépendant des grands groupes d'armement, ignoraient que l'art façonne le monde à l'image de l'artiste. C'était leur droit.
Il est d'autres combats, il est vrai. On peut, comme certain maire il y a trois semaines, soutenir la réouverture des bars, lieux certes importants de convivialité, mais dont on sait bien sûr qu'ils comportent naturellement plus de risques : absence de masques, proximité inévitable. C'est incompatible, en bonne intelligence, avec l'appel à l'armée pour désengorger les hôpitaux saturés de la région, mais on ne se refait pas. Chacun joue dans la cour qu'il peut.
Il est vrai que les librairies physiques, sous leurs différentes formes, représentent 20% des ventes de livres en France, pour un marché d'environ 4,5 milliards d'euros. Ce qui rend la situation compliquée, c'est qu'en démocratie, chacun sait ce qui est essentiel pour lui. Cette décision ne peut revenir à un gouvernement. La coiffure est essentielle, par exemple, pour la vieille dame qui revit littéralement quand elle supporte mieux sa propre image dans le miroir. Pour certain maire français qui a défendu les bars, ceux-ci étaient plus essentiels que tout, à part l'armée, bien sûr, appelée en renfort quand la bise fut venue. Chacun voit midi à sa porte, et les portes, décidément, sont basses.
 
 
 
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Chacun reste à sa place
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